Les premiers éléments contenus dans cet articles sont issus d’un ouvrage intitulé : « Essai de statistiques de l’île bourbon » – Tome premier – 1828 – rédigé par Pierre Philippe Urbain Thomas. Cet ouvrage est consultable dans sa version écrite à la société de géographie de Lyon.
Les années 1820 représentent pour l’île en général, mais aussi pour la commune de Sainte-Rose, un intérêt particulier. Comme le montre les éléments statistiques, qui seront développés, c’est à cette époque que l’activité agricole se diversifie et notamment que la production du café ralentie pour diverses raisons et que la culture de la canne à sucre se développe.
Mais avant d’aborder ces éléments structurels productifs de l’économie, il convient d’apporter des repères plus généraux sur la situation de Sainte-Rose à cette époque. C’est une des onze communes de l’île, elle s’étend depuis la rivière de l’Est jusqu’au pays du brûlé, dont la limite se matérialise par le rempart du bois blanc.
En 1824, la population recensée compte 1880 individus, soit un peu moins de 3% de la population totale de l’île. Les terres cultivées sont estimées à 775 000 gaulettes (1), soit, 4,6% de la surface totale de l’île mise en culture. Les cultures principales sont la girofle, le maïs, le café, les légumes et un peu de canne à sucre. Les services présents dans la commune sont au nombre de six, une boulangerie, quatre commerces et un officier de santé.
Les diverses séries statistiques consultables aux archives départementales permettent de constater un développement progressif de la commune et de l’activité agricole. 30 ans plus tard en 1855, la commune compte 3 247 habitants, dont 2 640 adultes travaillent dans le domaine agricole ou domestique. Cette année témoigne de l’activité présente dans la commune au moment où la culture et l’industrie de la canne à sucre font des progrès considérables.
Le tableau suivant présente les surfaces cultivées en 1828 et les compare à la situation en 1855. Si l’on constate une évolution très importante de la canne à sucre, dans des moindres proportions, le maïs et la disparition du café, les autres cultures restent présentes mais pour des surfaces peu significatives.
Pour ce qui concerne le développement de la canne, il s’est accompagné des installations « industrielles » nécessaires à sa transformation. En 1855, la commune compte 6 moulins à vapeur et un mué par l’eau.
Dans les années suivantes, la culture de la canne à sucre connaît les mêmes évolutions que pour l’ensemble de l’île. Elle ne sera épargnée, en autres, ni par les ravages des parasites, ni par les cyclones.
Abordons maintenant les capacités de la communes à exporter sa production. En 1828, l’auteur de l’ouvrage en référence fait le constat que tout le pourtour de l’île bourbon n’offre pas de port, mais seulement des rades plus ou moins faciles d’accès. Les deux seules rades ouvertes au commerce extérieur sont celles de Saint Denis et de St Paul. Les autres sont uniquement dédiées à la desserte locale. Ainsi, Sainte Rose compte uniquement deux rades accessibles : la rade des cascades, qui peut accueillir des petit bâtiments, constamment battue par les vents, elle n’est abordable et les navires ne peuvent appareiller que par des vents venant du sud. En allant vers le nord se trouve ensuite l’anse des maroquins, qui reste trop exposée pour l’appareillage des grands bâtiments. Puis vient en suivant, la rade de Sainte Rose. Cette rade n’est dangereuse que lorsque les vents sont orientés N-NO. Les caboteurs peuvent y effectués les chargements et déchargements en tranquillité, la crique étant pourvue de chaloupes et de pirogues de transbordement.
Le règlement de police des ports & rades de 1880 indique la façon dont un bateau doit aborder la rade de Sainte-Rose, on peut supposer que ces recommandations étaient déjà adaptées 60 ans avant : « un navire doit mouiller sur le plateau de mouillage en sable noir, partout ailleurs, le fond est constitué de coraux aux risque de perte d’ancre. La zone de mouillage identifiée mesure 300 mètres d’est en ouest et 160 de nord au sud. La profondeur de mouillage est sur 25 à 29 mètres à 325 mètres de la terre la plus proche en belle saison. Elle est conseillée à 370, 400 mètres, sur 38 à 40 mètres de fond en hivernage.« .
Précisons que la vocation de cette rade est d’embarquer et débarquer des denrées dont la provenance et la destination est la rade de St Denis. Le règlement de police des ports & rades n’autorisera les échanges extérieurs à l’île que depuis St Denis ou St Paul.
Revenons à l’analyse faite de la situation en 1828. Cet embarcadère est très utile pour ce quartier de la côte au vent le plus éloigné de St Denis, les transports par terre étant rendus difficiles et coûteux notamment à cause des rivières à traverser. Ainsi, contrairement aux autres communes qui voient au cours de cette période les moyens en transports terrestres augmentés de façon significative, à Sainte Rose le transport par voie maritime reste une vraie alternative. Les unités de transport attachées à la rade de Sainte Rose comptent à ce moment: 10 pirogues de pêche, 5 pirogues de charge. Les pirogues de pêche sont comptabilisées car elles peuvent servir aux transbordement en tant que de besoin.
Dans les année suivantes, cette organisation des échanges semble perdurer tant que l’activité liée à la culture de la canne à sucre est prépondérante. Toutefois, à la fin des années 1870, l’organisation globale de l’acheminement des denrées à l’export vers le tout nouveau et unique port de la pointe des galets, édictée par la compagnie du chemin de fer et du port de La Réunion apparaît avoir un impact sur l’activité de la rade. En effet, afin de rentabiliser les infrastructure dont elle avait la charge : voies de chemin de fer allant entre autres jusqu’à Saint Benoît et le port de la pointe des galets, cette compagnie imposera que les denrées devaient être acheminées via la voie ferrée.